Les Récits de la Tradition

Salomon (as) et Les Djinns


Louange à Allah, que la prière et le salut soient sur son prophète Mohamed sur sa famille et sur tous ceux qui le suivent jusqu’au jour de la résurrection.


Le trône de Salomon avait quatre pieds. Il était de rubis rouge, et on avait travaillé le rubis de façon à en faire quatre lions. Au-dessus de la tête de Salomon étaient quatre vautours, auxquels on avait fait des ailes étendues, afin de faire de l‘ombre à Salomon, quand il donnait audience. Quand il n’était pas sur son trône, les ailes de ces oiseaux se fermaient.

Les quatre lions formaient également un talisman. Nul autre que Salomon ne pouvait s’asseoir sur ce trône.

Lorsque Nubuchodonosor vint à Jérusalem et qu’il voulut s‘asseoir sur ce trône, il ne savait pas de quelle façon Salomon avait coutume de le faire. Or, quand il mit le pied sur le trône, les lions au pied du trône jetèrent chacun une griffe sur ses jambes et les lui broyèrent, et il tomba en bas du trône sans connaissance. On lui donna des remèdes, on le traita et on soigna sa jambe. Après lui, nul autre ne tenta plus de s‘asseoir sur le trône.

Quant aux paroles du Coran, aldjaufânou k’aldjewâbi, elles signifient des plats comme de grands réservoirs; et les mots qodoura râsiyât signifient des chaudrons grands comme des montagnes.

Les Djinns avaient coupé un morceau d‘une montagne et en avaient formé au chaudron et avaient fait au-dessous des foyers immobiles; et c’est là qu’ils faisaient cuire la nourriture. Le chaudron était également immobile. Enfin, quant aux figures qui sont mentionnées dans ce passage du Coran, c’étaient des représentations permises. En effet, Jésus, fils de Marie, l’Esprit de Dieu, avait formé des figures, selon l’ordre de Dieu, et avait soufflé dessus, et, par la permission de Dieu, elles devinrent oiseaux, et c‘étaient des formations d‘argile qui étaient comme des oiseaux.

Comme cela était permis, c’était aussi permis au Messie. On rapporte, d’après des sources authentiques, que le prophète, lorsqu’il prit la Mecque et qu’il y fit son entrée, était vêtu du turban sa‘hâbè; c‘était un turban noir. Il avait un drapeau noir, au haut duquel était figuré un lion. Toutes les fois que le vent soufflait, le lion paraissait très grand, parce que le vent déployait le drapeau.

Il est dit dans le Coran:

« Nous avons éprouvé Salomon, en plaçant sur son trône un corps, Ensuite, il se repentit. »

(Coran 38 Verset 34)

Voici comment se passa cette aventure:

Il y avait dans ces contrées un roi dont le royaume était situé dans une île. Il avait un grand pouvoir et était idolâtre.

Salomon résolut de l’attaquer. Il y avait entre lui et ce roi deux mois de chemin, et il fallait traverser la mer.

Salomon prépara son tapis, s‘y assit avec toute son armée, et traversa ainsi la mer jusqu‘à cette île. Puis il attaqua le roi et le tua; convertit à la vraie religion toute l’armée et les habitants de l’île et s’empara de tous les biens du roi. Le roi avait une fille; il n’y en avait pas de plus belle sur la terre. Salomon l‘emmena avec lui. Mais la jeune fille pleurait toujours de chagrin à cause de la perte de son père, et, chaque fois que Salomon allait la trouver, il voyait ses yeux en larmes et son cœur dans l’affliction, et elle ne voulait pas céder aux désirs de Salomon et ne parlait à personne.

Salomon en fut affligé et ne savait que faire. Alors il appela les Djinns et délibéra avec eux.

Les Djinns dirent :

« Nous avons un moyen. »

Puis ils firent une figure de marbre, ressemblant parfaitement au père de la jeune fille. D’autres disent que c’est lui-même qui avait demandé que les Djinns tissent cette figure. Quand la jeune fille vit cette statue ressemblant à son père, elle fut très-contente, et elle fit faire un trône royal, comme l’avait fait son père quand il était roi, et elle plaça la statue sur ce trône. Elle ne pouvait jamais se lasser de la regarder, et jour et nuit elle l’adorait et ne la quittait point; seulement elle parlait et était plus aimable envers Salomon. Elle adorait donc la statue de son père, et personne ne le savait, ni Salomon ni un autre, excepté Açaf ben Berakhyâ. On n’appelait jamais Açaf à l’audience dans le palais de Salomon, mais il y venait de temps en temps inopinément, et c’est ainsi qu’il savait que la jeune fille adorait la statue. Açaf savait le grand nom de Dieu, et c’est lui qui disposait de tout dans la maison de Salomon.

Car Salomon était un puissant roi; personne n’osait parler devant lui, ni hommes, ni femmes, ni jeunes gens, ni jeunes filles, tandis que personne ne craignait Açaf, et on ne lui cachait rien. Açaf donc alla trouver Salomon et lui dit:

« Ô prophète de Dieu, accorde-moi la permission d‘aller au temple et de faire mes dévotions; car mon temps approche et je veux laisser un bon souvenir. »

Salomon le lui accorda. Quelque temps se passa sans qu’Açaf vint auprès de Salomon; et il restait dans le temple, Salomon le fit appeler et lui dit :

« Pourquoi n’es-tu pas venu auprès de moi? »
Açaf dit :
« Parce que dans ta maison se trouve une idole. »

Salomon ordonna de briser la statue et de punir la jeune fille. Aussitôt il revêtit une robe pure et dit :

« Ô Seigneur, tu sais qu’il n’est point digne des fils de David que dans leurs maisons on adore un autre que toi, après tout le bien dont tu les as comblé.
Mais moi je l’ignorais; viens à mon secours. »

Et il se lamenta, et demanda pardon et pleure.

Salomon avait un anneau sur lequel était gravé le grand nom de Dieu, par le moyen duquel il était le maitre de l‘univers. La femme qui était la mère de ses fils s’appelait Djerâdè.

Salomon avait en elle plus de confiance qu’en ses autres femmes; chaque fois qu’il se retirait pour faire ses besoins, il confiait son anneau à cette femme pour qu’elle le gardât jusqu’à son retour. Or Dieu avait décidé ainsi qu’un jour, Salomon s’étant retiré et ayant donné son anneau à Djerâdè, l’un des grands Djinns prit la forme de Salomon; il se fit donner l’anneau par Djerâdè et s’assit sur le trône de Salomon, et tous se soumirent à ses ordres, à cause de l’anneau. Lorsque

Salomon revint, et demanda à Djerâdè son anneau, celle-ci lui dit:

« Je t’ai rendu l‘anneau. »
Salomon le nie, et ils disputèrent ensemble; puis Djerâdè dit:
« Tu n’es même pas Salomon, c‘est celui qui est assis sur le trône qui est Salomon; toi, tu es un Djinn qui a pris la figure de Salomon. »

Salomon resta stupéfait et il sortit de la maison. Partout où il allait disant qu’il était Salomon, on le battait et on lui répondait:

« Tu es un Djinn. »

Le Djinn était assis sur le trône de Salomon dans les vêtements de Salomon, et tout à fait semblable à lui.

Salomon, ayant faim, sortit de la ville et se dirigea vers le bord de la mer. Là il rencontra des pêcheurs et leur dit qu’il était Salomon. Ils lui firent courber la tête sous un bois en le faisant travailler, personne ne le protégeait, et il souffrait de la faim. Le soir ils lui donnèrent deux poissons, comme rétribution, en le laissant libre de les manger ou de les vendre. Salomon alla dans la ville et vendit l’un de ces poissons; il fit griller l’autre et le mangea avec du pain qu’il avait acheté du prix de l’autre poisson. Cela se passait ainsi tous les jours : il travaillait du matin au soir, et le soir il recevait deux poissons. Après quarante jours, Dieu lui pardonna et lui rendit le pouvoir.

Pendant que le Djinn était assis sur le trône, il faisait des ordonnances qui n’étaient pas, comme celles de Salomon, d’accord avec le Pentateuque. Les hommes savaient qu’elles étaient contraires au Pentateuque, mais, par crainte, ils ‘n’osaient rien dire. Alors Açaf et les enfants d’Israël se réunirent, et Açaf entra dans les appartements de Salomon et demanda aux femmes où était Salomon. Elles répondirent :

« Il y a longtemps qu’il n‘est venu nous trouver. »

Alors ils comprirent que ce n’était pas Salomon qui régnait, mais un Djinn. Les Djinns, de leur côté, vinrent auprès de lui et lui dirent :

« Donne-nous un souvenir, car ils veulent te chasser d‘ici. »
Il répondit: « Que désirez-vous? »
Ils dirent: « La science de la magie que Salomon a cachée. »

Il la fit chercher et la leur donna. Ils firent un trou au-dessous des quatre pieds du trône et y cachèrent les livres de magie, et personne, en dehors des Djinns ne le savait; quand Salomon eut repris le pouvoir, ces livres restèrent sous le trône.

Il est dit dans le Coran :

« Ils suivent ce que les Djinns ont imaginé sur le pouvoir de Salomon, (…) »

(Coran 2 Verset 102)

Il est resté une partie de ces livres de magie entre les mains des enfants d‘Israël, et tout ce qui en existe aujourd’hui provient de là.

Quelque temps après, les hommes devinrent très affligés de l’absence de Salomon, et ce Djinn faisait tout en secret avec les autres Djinns et tenait les hommes éloignés. Alors Açaf dit aux hommes : Je m‘informerai auprès des femmes. Celles-ci répondirent qu’elles n’avaient point de nouvelles de Salomon.

Alors ils délibérèrent comment ils pourraient faire périr le Djinn. Les Djinns allèrent le trouver et lui dirent : Prends garde, car les hommes veulent te perdre. Puis Açaf fit apporter le Pentateuque et appeler tous les lecteurs du Pentateuque. On dit qu’ils étaient au nombre de quatre mille. Ils récitèrent le Pentateuque en présence du Djinn. Celui-ci ne put entendre cette lecture et s’enfuit. Après cela, les hommes se mirent à la recherche de Salomon. Le Djinn, ne sachant aucun endroit sûr pour cacher l’anneau du roi Salomon, le jeta dans la mer.

Un poisson l’avala, et, par un acte de la Providence, ce poisson fut pris ce jour-là même dans le filet. Le soir, les pêcheurs donnèrent à Salomon les deux poissons. Comme tous les jours, il en vendit un et ouvrit l’autre pour le griller et le manger, et il y trouva l’anneau.

Salomon le mit à son doigt et revint dans sa résidence. Les hommes, les Djinns et les oiseaux se réunirent autour de lui, et il rendit des actions de grâces à Dieu. Puis il dit aux Djinns :

« Amenez-moi ce Djinn»
Ils répondirent : « Il s’est caché au fond de la mer, nous ne pouvons pas le saisir. »

Et on ne put s’en emparer pendant plusieurs années. Ensuite une troupe de Djinns s’en alla au bord de la mer et se mit à crier et à pleurer sur Salomon à haute voix.

Ce Djinn, qui s’appelait Dhadjar, cria du fond de la mer :

« Qu’avez-vous? »
Ils répondirent : « Salomon est mort. »

Alors le Djinn sortit de la mer et vint auprès d’eux. Les Djinns le saisirent et l’amenèrent devant Salomon.

Salomon ordonna de le mettre entre une pierre et du fer, de l’attacher fortement et de le jeter au fond de la mer, où il reste jusqu’au jour de la résurrection.

Cette histoire s‘est passée telle que raconté. Mais Mohammed ben Djarir, dans la chronique de Tabari, l’a rapportée d’une façon inexacte, en disant que le Djinn a agi comme Salomon, et qu’il a rendu des arrêts comme lui. Il n’est pas juste de dire qu’un Djinn puisse faire l’œuvre d’un prophète.

On raconte aussi cet événement de la manière suivante :

Une nuit, Salomon se proposa d’avoir commerce avec chacune de ses femmes, afin que de chacune d’elles naquit un fils, et que tous ces fils, devenus grands, pussent aller combattre les infidèles et que chacun d’eux en tuât mille, et que lui en eût de la gloire. Dieu n‘agréa pas ces pensées, et une de ces femmes mit au monde un enfant dont tout le corps était difforme.

Après sa naissance, Gabriel le plaça sur le trône. Dieu envoya une vision à Salomon en lui disant:

« As-tu vu ce membre de ta famille quand tu as eu des pensées orgueilleuses? Va, regarde ton fils qui est placé sur le trône. »

Salomon alla et vit un corps sans bras ni jambes. Il en fut épouvanté, et il se repentit. Cet enfant mourut après quarante jours. Après cet événement, Salomon vécut encore vingt ans; il régna en tout quarante ans.


Sur ce, Que la Paix de Dieu soit sur vous et vous accompagne partout où vous êtes.


(Chronique de Tabari Tome 1 P.448)

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