Les Temps Forts de l’Histoire Islamique : Les ‘Abbassides
Louange à Allah, que la prière et le salut soient sur son prophète Mohamed sur sa famille et sur tous ceux qui le suivent jusqu’au jour de la résurrection.
L’an 132 de l’hégire (750 ap. J-C) vit l’avènement d’une nouvelle dynastie, celle des ‘Abbassides dont la lignée remonte à Al-‘Abbâs Ibn ‘Abdil- Muttalib, l’oncle du Messager (saw). Cette dynastie perdurera plus de cinq siècles, de l’an 132 à l’an 656 (750 – 1258).
Trente-sept califes se succéderont à la tête du califat ‘abbasside qui passera par quatre phases :
L’ère première, puis l’époque turque puis le régime bouyide, et enfin l’ère seldjoukide.
Les califes ‘abbassides les plus importants sont sans conteste Abû Ja’far Al-Mansûr et Hârûn Ar-Rashîd.
Abu Ja’far Al-Mansur
Considéré comme le véritable fondateur de la dynastie, Al-Mansûr devient calife en l’an 136 de l’Hégire (754 ap. J-C.) environ à l’âge de quarante ans. Son califat dura environ vingt-deux ans. Ses principales caractéristiques étaient la prudence, la lucidité, le génie stratégique, et la gestion économique des finances.
L’histoire retiendra d’Abou Ja’far qu’il a réussi avec talent et brio à diriger le califat ‘abbasside dans une période difficile, où les révoltes et les troubles furent nombreux.
Sur le plan des conquêtes, les forces islamiques parviendront sous l’ère Al-Mansûr à conquérir la région du Tabaristan, qui deviendra une région à part entière de l’Empire musulman, dans laquelle l’Islam se propagera.
Sur le plan intérieur, une des actions les plus importantes réalisées par Abû Ja’far sera l’édification de la ville de Baghdâd, qui deviendra la capitale du régime ‘abbasside, ainsi que la cité la plus importante du monde musulman de cette époque.
Finalement, en l’an 158 de l’hégire, Al-Mansûr mourut. Il laissera un état ‘abbasside puissant, doté de fondations solides et d’une brillante économie. Il y avait dans les caisses de l’Etat, à sa mort, la richesse la plus importante jamais laissée par un calife cabbasside. Il y avait, en effet, à peu près 70 millions de dirhams.
Harun Ar-Rashid
Considéré comme le plus illustre calife de la dynastie ‘abbasside, Hârûn Ibn Muhammad Al-Mahdî, le petit-fils d’Abû Ja’far Al-Mansûr, devint calife au mois de Rabî’ Al-Awwal de l’an 170 de l’Hégire et le restera jusqu’à ce que la mort l’emporte en l’an 193.
Il règnera vingt-trois ans à la tête de l’Etat. Hârûn Ar-Rashîd représente, tant sur le plan de la puissance que sur celui du développement, l’apogée de la dynastie ‘abbasside.
Sur le plan intérieur, il réussit à repousser les dangers qui menaçaient la dynastie, qui étaient du même ordre que ceux qui menaçaient la dynastie à l’époque de son grand-père Al-Mansûr. En effet, les ‘Alaouites s’étaient activés contre les ‘Abbassides et se révoltèrent mais Hârûn Ar-Rashîd sortira vainqueur de la confrontation. De plus, il affaiblira les Kharijites.
Sur le plan extérieur, l’histoire retiendra qu’il accula les Byzantins et conquit nombre de leurs bases. Parmi ses victoires les plus importantes, la prise en 188 d’Héraclès (dans l’actuelle Turquie) et la soumission de Byzance, qui acceptera de payer le tribut de capitation « Jizyah » au calife ‘abbasside.
De plus, sous l’impulsion de Hârûn Ar-Rashîd, le mouvement scientifique s’activa dans divers domaines. La ville de Baghdâd devint alors le pôle d’attraction des savants, poètes, et de toute personne désirant approfondir ses connaissances.
Il y avait les plus grands savants du hadith, les plus grand récitateurs de Coran, des jurisconsultes, des grammairiens, des érudits de l’arabe, des poètes, des hommes de lettres. Les cours se déroulaient dans les mosquées qui faisaient également office d’école et d’université.
Finalement, en l’an 193 de l’Hégire (808 ap. J-C.), Hârûn Ar-Rashîd s’éteignit dans la ville de Tûs après un long califat qu’il passa sans relâche à tenter d’élever l’Islam et les Musulmans. Il avait alors quarante-sept ans.
Le Rayonnement du Mouvement Scientifique sous l’ère ‘Abasside
Sous la dynastie ‘abbasside, et grâce à l’impulsion donnée par ses califes tels que Hârûn Ar-Rashîd et son fils le calife Al-Ma’mûn, le mouvement scientifique et culturel musulman prit son essor. La période d’Al-Ma’mûn (de 198 à 218 H.) représente l’apogée de l’activité scientifique.
Et pour cause, Al-Ma’mûn était un savant qui aimait la science et ses adeptes. De plus, l’abondance dont jouissait l’état ‘abbasside, encouragea beaucoup de gens à participer à ce mouvement scientifique. C’est ainsi que Baghdâd et d’autres villes devinrent des centres de rayonnements de la science, de la culture et de la civilisation.
C’est d’ailleurs à l’époque des ‘Abbassides qu’une nouvelle discipline fit son apparition, la science de l’exégèse (« Tafsîr »). D’illustres exégètes tels qu’At-Tabarî, Az-Zamakhsharî et An-Nasafî s’y distinguèrent.
C’est également à cette époque qu’apparurent, dans la science du hadith, des hommes exceptionnels comme Al-Boukhâri et Muslim. C’est également à cette époque que les quatre écoles de jurisprudence bien connues virent le jour et se développèrent. En grammaire, deux écoles émergèrent, l’école de Basrah et celle de Kûfâ. La rivalité entre ces deux écoles conduira à l’épanouissement de cette discipline et à sa réglementation.
La littérature arabe aura également une belle part dans la renaissance scientifique, et de grands hommes de lettres tel qu’Al-Jâhizh et Ibn Al-Muqaffa’ s’illustreront.
En outre, d’excellents poètes se distingueront parmi lesquels : Abou Al-‘Atâhyah, Abû Tammâm et Al-Buhturî.
Ce réveil scientifique ne sera pas cantonné aux domaines précédents mais s’étendra pour englober toutes les sciences. La raison de cet essor scientifique sera le contact des Musulmans avec les autres peuples, comme les Perses, les Grecs et les Indiens. Et dans ce cadre, plusieurs ouvrages anciens dans des disciplines aussi variées que la chimie, la médecine, l’astronomie, l’algèbre, l’ingénierie, la philosophie etc., seront traduits.
Les Arabes et les Musulmans ont digéré les sciences des autres peuples et en ont emprunté ce qui correspondait à leur personnalité musulmane. Le mouvement scientifique se développera et nombre de savants musulmans émergeront dans différentes sciences.
L’Ere Bouyide
Au début du quatrième siècle de l’Hégire, les califes ‘abbassides avaient considérablement faibli.
Aussi, en l’an 334, le chef ‘Abdullah Ahmad Ibn Buwayh Ad-Daylamî prit le contrôle de Baghdâd et même de tout l’Iraq et y établit un pouvoir fondé sur l’hérédité de la famille Bouyide. Cette période sera connue dans l’Histoire comme l’ère bouyide ou buwayhide.
Les califes ‘abbassides, malgré la différence d’école de pensée, n’eurent d’autre choix que d’accepter leur mainmise. En effet, les Bouyides étaient des chiites (zaydites) alors que la majorité du peuple ainsi que les ‘Abbassides eux-mêmes étaient Sunnites.
Les Bouyides jouirent de toutes les prérogatives du pouvoir et exercèrent toutes les attributions de l’autorité. Absolument toutes les affaires politiques, économiques et militaires étaient entre leurs mains. Quant aux califes ‘abbassides, leur autorité s’affaiblit et se cantonna aux aspects formels et officiels, comme le fait qu’on fasse des invocations en leur faveur sur les minbars le vendredi ou encore de graver leur nom sur la monnaie.
L’autorité des Bouyides cessera en l’an 447 de l’Hégire (elle avait duré 113 ans), quand le général seldjoukide Toghrul Bay, qui gouvernait la ville de Ray (dans la province de l’actuelle Téhéran), parvint à pénétrer dans Baghdâd après que le calife abbasside l’avait appelé à l’aide. Cette entrée fut le signe de permission pour les gouverneurs seldjoukides de contrôler les califes ‘abbassides. Cette ère durera à peu près un siècle et demi.
L’Ere Seldjoukide
Alp Arslan fait partie des plus illustres gouverneurs seldjoukides. Il infligea aux Byzantins une cuisante défaite à la bataille de Malazgirt (ou Manzikert) à la fin de l’an 463 H. Son état étendit son autorité sur une vaste région des terres chrétiennes d’Orient. Quand Alp Arslan mourut en l’an 465 de l’Hégire, son fils, Malik Shâh Ier accéda au pouvoir. Le régime d’Arslan avait duré une vingtaine d’années environ et son règne est considéré comme l’apogée de l’ère seldjoukide en raison des nombreuses conquêtes qui furent achevées pendant cette période en terres byzantines, au point qu’il imposa un tribut annuel aux empereurs byzantins.
On retiendra à son actif, sa désignation comme vizir d’un homme savant et aimant les savants, politicien chevronné, bon administrateur et très compétent.
Cet homme n’était autre que le Vizir de renom Nizhâm Al-Mulk.
C’est à cet illustre ministre que l’on doit les fameuses écoles An-Nizhâmiyah. La première de ces écoles fut édifiée à Baghdâd en 458 H., puis elles se répandirent dans bien des centres de civilisation islamique. Ces écoles se développèrent par la suite pour devenir des sortes d’universités et de centres de recherche et d’innovation.
Parmi les savants de renom qui enseignèrent à cette école, on retrouve l’imam Al-Ghazâlî.
Le pouvoir seldjoukide perdurera à Baghdâd jusqu’en 590 de l’Hégire.
L’Ere Andalouse
Alors que la dynastie abbasside s’était formée en Orient musulman et avait choisi Baghdâd pour capitale, une autre dynastie musulmane était apparue (ou plutôt réapparue) à l’extrême Occident islamique, celle des Umayyades d’Andalousie, qui avait pris pour capitale la ville de Cordoue (« Qurtubah »).
Après l’effondrement de la dynastie Umayyade au profit des ‘Abbassides, ‘Abdurrahmân Ibn Mu’âwiyah Ibn Hishâm Ibn ‘Abdilmalik (qui sera connu sous le nom de ‘Abdurrahmân Ier ; ‘Abdurrahmân l’Exilé ou encore le Faucon de Quraysh) fuit la répression ‘abbasside et entre en Andalousie.
Là-bas, il parvient en 138 de l’Hégire à édifier un nouvel état Umayyade qui perdurera jusqu’en 422 H. Plusieurs chefs se succéderont au pouvoir, le plus illustre étant sans conteste ‘Abdurrahmân An-Nâsir qui s’autoproclamera calife.
An-Nâsir gouvernera cinquante ans, de l’an 300 H. à l’an 350 H. Sa renommée est due à ses actes grandioses parmi lesquels :
– Le contrôle des révoltes qui s’étaient répandues dans toute l’Andalousie avant son accession au pouvoir. Il restaurera l’unité et la force à l’Andalousie musulmane.
– Le combat mené au Nord contre les Chrétiens, grâce auquel An-Nâsir concrétisera un grand nombre de victoires contre les ennemis de l’Islam.
A côté de ces grandes actions politiques, An-Nâsir fera de l’Andalousie un pays d’une civilisation de rang mondial. En effet, Cordoue rivalise à son époque, et même avant lui, avec Baghdâd dans la renommée scientifique.
C’est en effet à Cordoue et en Andalousie de manière générale, que toutes les branches du savoir fleuriront et qu’un grand nombre de savants se distingueront.
Nous citerons à titre d’exemple, Yahyâ Al-Laythî qui était jurisconsulte et savant du hadith, un ingénieur innovant et un grand théoricien en la personne de ‘Abbâs Ibn Firnâs ; et Ibn ‘Abdi-Rabbih, l’auteur du livre « Al-‘Iqd Al-Farîd ».
Néanmoins, la dynastie Umayyade tombera en 422 H. et l’Andalousie connaîtra plusieurs autres régimes, notamment celui des Murâbitîn et celui des Muwahhidîn. Avec la chute de ces derniers en 674 H., la présence islamique en Andalousie déclinera jusqu’à se réduire au sud de la péninsule ibérique à l’Etat des Banû Al-Ahmar, qui y gouvernait et avait pris comme capitale la ville de Grenade (« Gharnâtah »). Ils luttaient pour demeurer le plus longtemps possible.
Finalement, sous les coups des Francs et des autres Chrétiens, Grenade tomba en 897 H., entrainant la fin de la présence islamique en Andalousie, présence qui s’était étalée sur près de huit siècles dans cette partie de l’Europe.
Les causes de la fin du pouvoir musulman en Andalousie furent : le penchant des Musulmans vers le luxe et le fait qu’ils aient délaissé le combat ; la faiblesse de l’esprit islamique ; la division des Musulmans et la rivalité de leurs gouverneurs pour le pouvoir ; le grand nombre et la force des Francs.
Sur ce, Que la Paix de Dieu soit sur vous et vous accompagne partout où vous êtes.