Jour 6 : le Jour de la Résurrection
Il y a environ mille cent ans, les musulmans ont été surpris par l’apparition d’une école exceptionnelle. Le créateur de cette école était l’Imam Al-Muhâssibî, abû abdallâh al-Hârith.
Le but de cette entreprise unique selon ce grand Imam était de servir de rappel de vérités de l’au-delà. La mort, la tombe, le grand rassemblement, le Jour de la Résurrection, le Paradis, l’Enfer… autant de réalités apparemment absentes et oubliées dans la vie des musulmans. L’Imam observait avec tristesse la vie excessivement matérielle et superficielle que menaient ses contemporains, excepté quelques étudiants et très peu de savants. L’indifférence à la science et à la religion était la caractéristique dominante de l’époque.
Toute la réussite de cette école venait du fait que l’Imam procédait d’une manière absolument innovatrice dans ses cours. Il transportait son auditoire dans un monde vrai mais non présent de sorte qu’il fallait pour y accéder une très bonne imagination. L’Imam rappelait par les versets et les hadiths, les différentes étapes que chacun franchira après sa mort. Cependant il importait que chaque élève soit conscient que ce chacun était lui-même et devait user de son imagination pour s’imprégner profondément dans les faits successivement dévoilés par l’Imam.
Après quelque temps, l’Imam remarquait que la vie de beaucoup de disciples commençait à changer et à s’améliorer, et que contrairement à ce que pensaient ceux qui attaquaient son travail en prétendant qu’il ne faisait que droguer les gens par des récits fascinants de l’au-delà, le résultat obtenu était excellent. Il voyait de ses propres yeux qu’il s’opérait de vrais progrès dans les convictions et les pensées des gens qui, troublés certes par toutes ces visions fascinantes, ne transformaient pas moins ce trouble en actions bien concrètes et sincères.
En effet et pour donner un exemple de l’influence de ses leçons, il découvrait qu’après avoir parlé du hadith : « Celui qui prend une voie pour acquérir du savoir, Allah l’Exalté lui facilitera un chemin vers le Paradis », et apprenant la rétribution de cette action dans l’au-delà, plusieurs jeunes gens ont fait preuve d’assiduité dans les études, ce qui prouve qu’ils ont bel et bien converti ce qu’ils ont entendu en actions et provoqué ainsi le changement de leurs vie. Plusieurs autres conséquences non moins déterminantes confirmaient et appuyaient le jugement de l’Imam.
L’Imam, pour notre grande satisfaction, a reporté avant sa mort l’ensemble des leçons professées dans cette école dans un livre intitulé « Imagine-toi » et nous pouvons ainsi des siècles après la fermeture de l’école, profiter sûrement et amplement des cours qui y ont été enseignés.
Nous allons reprendre quelques faits relatés dans ce livre, mais en les relatant, nous demandons à chacun d’observer l’unique règle exigée par cette école et suivre chaque partie en se forçant à se voir comme l’acteur principal des scènes qu’il aura devant les yeux de son esprit.
Vous savez sans doute que le Jour de la Résurrection a également d’autres désignations ; jour du rassemblement, jour de la grande perte, l’inévitable, le fracas…, mais toutes n’ont pas la même signification. Chacune de ces désignations nous révèle un événement particulier.
Le Jour de l’Appel Mutuel :
Cette dénomination surprenante a été mentionnée dans l’un des versets du Coran :
« Ô mon peuple, je crains pour vous le jour de l’Appel Mutuel »
La grande foule humaine effrayée est éparpillée sur une vaste étendue et chacun se sentant malgré cela seul et abandonné, est entrain de lancer des appels au hasard espérant être entendu par une personne amie. Peut-être est-ce des cris de détresse jetés çà et là ? Cependant il peut aussi s’agir de cris de joie, de félicité mais approchons-nous encore pour mieux discerner ce qui s’y passe.
Ecoutons d’abord le premier appel :
« Et on soufflera dans la Trompe, et voilà que ceux qui seront dans les cieux et ceux qui seront sur la terre seront foudroyés, sauf ceux qu’Allah voudra [épargner]. »
Le Prophète (saw) avait décrit cet appel comme s’il l’avait devant les yeux :
« Comment puis-je jouir sans souci des plaisirs d’ici-bas alors que l’ange qui porte la corne l’a pris dans la bouche, a penché son front, prêtant l’oreille en attente de l’ordre divin de souffler pour s’exécuter ? »
Vous arrivez à vous figurer cette image extraordinaire ? Le Prophète la décrit comme un fait du présent, et a précisé dans une autre occasion que sa venue est voisine de l’Heure comme sont voisins les deux doigts de la main.
Nous sommes encore là, et déjà les événements de l’au-delà se préparent, seulement est-ce que nous sommes prêts à les confronter? Beaucoup de gens hélas vivent dans une complète et dangereuse insouciance. Ne savent-ils pas ce qui les attend ? Mais bientôt il ne sera plus temps de se repentir de cette indifférence.
Allah l’Exalté appelle l’ange de la mort :
« O Ange de la mort que reste-t-il parmi les créatures ? » Il répondra : « Il reste Tes serviteurs Djibril, Mikaïl, Isrâfil ainsi que ton serviteur l’Ange de la mort » « O Ange de la mort prends l’âme de Djibril ! « Et l’âme de Djibril sera prise ». »
L’ange de la mort prendra alors successivement l’âme de Mikaïl et Isrâfil puis l’ordre lui sera donné de prendre sa propre âme. Allah l’Exalté fera ensuite un appel terrible :
« A qui appartient aujourd’hui la royauté ? A qui appartient aujourd’hui la royauté ? A qui appartient aujourd’hui la royauté ? »
Mais personne ne répondra parce qu’il n’y aura plus personne !
Tout à coup le deuxième souffle est parti :
« Puis on y soufflera de nouveau, et les voilà debout à regarder. »
Toutes les créatures sont mortes au premier souffle de la trompe et toutes ont été ressuscitées au second. C’est la résurrection. Mais où sont passés les montagnes, les océans, les déserts ? Tout a été anéanti, détruit, broyé, brisé ; il ne reste plus rien. La terre elle-même n’existe plus. Mais alors, et nos richesses, nos propriétés, nos projets, nos rêves, nos trésors ?! Certes la vie présente n’est qu’un objet de jouissance trompeuse.
Vous êtes à présent sur une nouvelle terre, nue, déserte et toute blanche. A quoi pensez-vous ? Est-ce que vous avez peur ? Il y a bien des gens autour de vous, mais ils ne vous inspirent pas confiance, ce sont des étrangers, peut-être aussi ont-ils un aspect effrayant ? Vous arrivez à reconnaître quelqu’un, un frère, un parent, un ami ? Oui ? C’est bien, cela veut dire que vous avez été une famille soudée et pieuse. Vous n’avez donc rien à craindre, les anges vous couvrent et vous rassurent:
« Vous serez à l’abri de toute crainte et vous ne serez point affligés »
Cependant vous arrivez à voir d’autres familles. Vous voyez quelqu’un courir, s’enfuir loin de ses proches, l’air perdu et épouvanté.
Certes, ce jour-là, chacun trouvera les conséquences de ses actes ici-bas. Les familles dont les membres ont rompu leur lien de parenté à cause de haines et de conflits pour des richesses matérielles se retrouvent ici dans un terrible embarras mais alors combien insignifiantes leur semblent leurs querelles passées !
Vous pensez instantanément aux paroles de notre Prophète (saw) :
« Jamais n’entrera au Paradis celui qui rompt ses liens de parenté » !
Vous éprouvez un immense chagrin en pensant à votre propre cas. Il y a un cousin avec lequel vous aviez eu des problèmes. Le temps et les occupations aidant, vous avez tout simplement oublié de renouer contact avec lui, et une douloureuse question vous préoccupe l’esprit ; est-ce qu’on vous en tiendra compte maintenant ? Au même instant et comme si vous receviez une réponse immédiate, vous apercevez le lien de parenté suspendu au Trône et qui dit exactement comme l’avait décrit le Prophète (saw) :
« Celui qui me maintient, Allah le rapprochera de Lui et celui qui me rompt, Allah rompra avec lui ».
Cela ne fait qu’augmenter votre angoisse et votre indécision.
Votre préoccupation n’empêche pas les autres de bouger. Vous revoyez ce triste fugitif s’éloigner encore.
Cette personne s’enfuit effectivement parce quelqu’un l’appelle ; peut-être sa propre mère ? Sauf qu’il ne répondra pas à son appel maintenant pas plus qu’il n’a répondu à ses appels de leur vivant !
« Le jour où l’homme s’enfuira de son frère, de sa mère, de son père, de sa compagne et de ses enfants, car chacun d’eux, ce jour-là, aura son propre cas pour l’occuper. »
Mais voilà qu’Allah l’Exalté lance un nouvel appel :
« Et le jour où Il les appellera, Il dira: « Où sont ceux que vous prétendiez être Mes associés? » »
A qui est adressé cet appel menaçant ? Se pourrait-il que vous soyez concernés ? Non bien sûr que non, dites-vous, je n’ai jamais prétendu cela !
Néanmoins, il ne faut pas penser que cette menace terrible est destinée à ceux qui ont adoré des idoles seulement ; d’ailleurs les idoles sont variées :
« Vois-tu celui qui prend sa passion pour sa propre divinité? »
Un autre peut prendre le dirham pour divinité non pas qu’il l’adore à la manière courante mais il ne vit que pour l’argent ; jamais content, jamais rassasié. Le Prophète (saw) a dit : « Malheur au serviteur du dirham.»
Chacun d’entre nous est maîtrisé par ce qu’on pourrait appeler le centre de sa vie. Quelque priorité autour de laquelle gravitent toutes ses actions. Si quelque chose venait à se contredire avec ce centre, elle est d’emblée repoussée et rejetée. Le composant de ce centre enfui au plus profond de nous-mêmes, peut-être l’argent, les enfants, le rang social ou autre chose de pire encore.
Ce sera toutefois en vain qu’ils nieront ce qu’ils ont idolâtré. Ce jour-là, chacun sera contraint de suivre son idole. Un ordre sans appel leur parvient sinistre et accablant
« Et on [leur] dira: « Appelez vos associés ». Ils les appelleront, mais ceux-ci ne leur répondront pas »
Vous voyez leur honte et leur avilissement, un tel appelle son argent, une autre appelle l’homme avec qui elle s’est enfuie trahissant sa famille, sa religion et son honneur. Seulement, rien ni personne ne répond à ces misérables.
Ici une confrontation poignante se déroule entre ceux qui ont associé et leurs idoles :
« Voici, Seigneur, ceux que nous avons séduits. Nous les avons séduits comme nous nous sommes dévoyés nous-mêmes. Nous les désavouons devant Toi: ce n’est pas nous qu’ils adoraient ». »
Les suiveurs s’écrient avec un regret douloureux :
« Ah! Si un retour nous était possible! Alors nous les désavouerions comme ils nous ont désavoués! »
Est-ce qu’ils avaient des excuses, n’ont-t-ils pas été avertis ? Ils seront obligés de répondre à cette question aussi car point d’injustices en cet endroit. Admettant au contraire avoir été avertis, ils seront interrogés encore:
« Que répondiez-vous aux Messagers? »
Peut-être que vous entendez maintenant cette question posée au peuple de Noé. Allah l’Exalté demande au prophète Noé :
« – As-tu transmis ton message ? – Oui, Seigneur, répond Noé. Puis Allah interroge son peuple : ‘Vous a-t-il transmis le message ? – Non, Seigneur, nous n’avons eu ni annonciateur ni avertisseur. »
Vous êtes en ce moment bien indigné par ce grossier mensonge. Cependant, ce dialogue formidable se poursuit. Allah demande à Noé :
« As-tu quelqu’un pour témoigner en ta faveur ? – Muhammad et sa communauté, Seigneur. Répond Noé (as). »
A cet instant, vous vous sentez fier et honoré d’autant plus qu’on vous demande de vous rapprocher et qu’on vous demande si vous pouvez témoigner. Vous dites : « – Assurément. Je témoigne que Noé dit vrai. – Est-ce que tu étais présent ? As-tu vu et entendu ? – Non, Seigneur, mais j’ai lu le Coran, et je crois à ce que notre prophète Muhammad nous a rapporté, je témoigne que Noé (as) a bel et bien transmis son message. »
Malheureusement votre bonheur se complique rapidement d’un serrement de cœur car vous venez d’apercevoir non loin de cette scène, des gens repoussés et emportés bien loin. Quoiqu’ils appartiennent comme vous à la communauté de Muhammad (saw), ils ne sont pas jugés dignes de rendre ce témoignage solennel. Parmi eux vous avez reconnu votre propre frère.
Imaginez au contraire que vous êtes parmi ceux dont le témoignage a été refusé sans que vous puissiez objecter. Vous étiez insouciant et absent de tout ce qui se rapportait à la religion. Pourvu que vos désirs soient comblés, vos intérêts atteints et que votre présent soit satisfaisant que vous importait-il de plus ? Qu’il y ait un avenir sûr et fatal dans l’au-delà auquel il faut se préparer plus sérieusement, cela ne vous effleurait même pas l’esprit. S’il arrivait qu’on en parlait devant vous, vous vous écriez :
« – Arrêtez donc de nous compliquer l’existence; vous êtes trop sérieux. Sacrifices, renoncements, efforts, pourquoi tout cela ? Je dis cela mais je ne suis pas contre la religion, comprenez-moi bien ; d’ailleurs je ne fais rien de mal, je donne même l’aumône quand je suis de bonne humeur. Puis vous en riez de bon cœur. »
Vous n’avez plus envie de rire maintenant. Vous êtes là, honteux et plein de remords et malgré cela vous vous sentez incapable de nier que vous êtes bien coupable de ce qui vous arrive. A cet instant vous entendez cet appel pétrifiant :
« Alors chaque âme viendra accompagnée d’un conducteur et d’un témoin »
Après cela, plus aucune possibilité de désavouer ou démentir quoi que ce soit ! Votre désespoir est au comble lorsque votre compagnon déclare devant vous, preuves à l’appui : « Voilà ce qui est avec moi, tout prêt ».
Bien que votre situation soit critique en ce moment, d’autres appels vous parviennent encore. Cela se passe très loin de l’endroit où vous êtes debout et malgré toute cette distance, vous voyez et entendez distinctement ce qui s’y déroule.
Un homme est entouré de dizaines de personnes parmi eux des enfants ! Ils se cramponnent tous à ce malheureux en s’écriant :
« Seigneur, cet homme nous a opprimés, nous réclamons nos droits ! » Allah l’Exalté leur demande ce qu’ils désirent. – Nous voulons prendre ses bonnes actions. Allah leur répond qu’il n’en a plus aucune, que déjà d’autres gens lui avaient pris le peu qu’il avait. – Alors, qu’on nous débarrasse de nos mauvaises actions et qu’elles lui soient données, exigent-ils à la fois ! »
Une peur indescriptible apparaît tout à coup sur la figure de cet ancien tyran. Il voit une ombre épaisse et noire s’approcher de lui, il essaie de s’enfuir mais ses pieds semblent cloués au sol, cette ombre se transforme vite en une forme grossière, difforme, démesurée ; le malheureux voit s’agrandir des mains monstrueuses qui sortent de cette ombre et qui le saisissent brutalement
Le plus horrible dans la position de ce malheureux, c’est qu’il est tout à fait conscient et convaincu que c’est là un châtiment juste. Pendant qu’on le traîne rudement, il se souvient parfaitement qu’il avait écouté une leçon qui lui parlait des conséquences de l’oppression. Il entendait sonner dans ses oreilles les paroles que lui transmettait son ami ; – Le Prophète a dit : « L’oppression est ténèbres le jour de résurrection. » Il revoit distinctement le visage de cet homme qui avait passé des mois à lui conseiller de cesser d’opprimer les gens, de rendre les droits à leurs propriétaires avant qu’il ne soit trop tard, mais lui, avait non seulement refusé d’écouter les conseils de son ami mais l’avait raillé, insulté, chassé. Imbécile que j’étais ! Pense-t-il amèrement
Au même moment, vous entendez un appel violent et puissant :
« Vous deux, jetez dans l’Enfer tout mécréant endurci et rebelle, acharné à empêcher le bien, transgresseur, douteur »
Quelques personnes arrivent ensuite de toute part, mais elles ne marchent pas naturellement, il vous semble qu’elles sont plutôt poussées, traînées, bousculées par tous les côtés. Soudain vous voyez une immense obscurité montante et fumante les envelopper jusqu’au dernier.
« Le jour où Nous dirons à l’Enfer; « Es-tu rempli? » »
Vous comprenez vite ce que c’était que cette obscurité haute comme une montagne et noire comme un sépulcre et votre épouvante devient insupportable en entendant une voix jaillir de ce gouffre profond où tous ces infortunés ont été engloutis. Une voie formidable et déchaînée criant: « Y en a-t-il encore? »
Omar Ibn Al Khattâb (ra) avait l’habitude de répéter cette invocation :
« Seigneur, nous cherchons refuge auprès de Toi, d’être la réponse de la demande de l’enfer.
Brusquement vous percevez une vive émotion parcourir les rangs. Vous essayez de comprendre ce qui se passe mais ce n’est pas aisé, vous avez de plus en plus de mal à bouger, la foule se fait plus dense et plus épaisse autour de vous. Cela ne dure pas très longtemps, car des gens quittent les rangs petits à petit, vous réalisez enfin la cause du trouble qui traverse la foule depuis un moment. Un nouvel appel vous parvient clairement. Une voix indescriptible était entrain de crier des noms de gens pour la comparution devant Le Contraignant.
Des anges viennent soudain près de vous mais avant même que vous ayez pu comprendre ce qui se passe ; ils sont déjà loin entraînant avec eux un homme qui ne cessait de se débattre et de se retourner. Vous avez le temps de le dévisager avant qu’il ne disparaisse complètement. Son visage était d’un bleu à glacer le sang.
Ali Ibn Abi Taleb (ra) disait :
« Je connais des gens dont la chair du visage va tomber de honte lorsqu’ils vont comparaître devant Allah l’Exalté. »
Imaginez que ce soit vous. Car vous aviez beau commettre des erreurs, vous ne vous êtes jamais couché sans d’abord vous repentir. A présent vous êtes plutôt pressé de rencontrer Allah l’Exalté. Vous n’êtes pas tout à fait sûr que vous soyez sorti d’affaire, vous ne voyez toujours pas le Paradis mais depuis quelque temps, des anges passent à vos côtés et vous sourient.
Vous voyez vaguement des visages familiers qui vous regardent avec gratitude.
Vous vous souvenez subitement de l’aumône que vous aviez l’habitude de donner à cette pauvre famille qui habitait près de chez vous. Vous n’étiez pas riche, mais vous étiez si content et attendri par le ravissement des petits garçons lorsque vous leur rapportiez de la nourriture, des livres ou des jouets que vous n’aviez jamais pu rompre cette coutume même quand vous aviez des problèmes.
Vous osez vous réjouir complètement lorsque vous entendez prononcer votre nom car au même moment tout s’éclaire autour de vous.
Imaginez que vous êtes maintenant en attente pour rencontrer Allah l’Exalté. Vous sentez un bonheur inouï. Cela faisait si longtemps que vous attendiez ce moment magique, sublime, ineffable. Vous sentez votre cœur battre très fort, vous n’arrivez pas à respirer, votre regard est presque aveuglé par tant de clarté. Vous avez envie de pleurer et vous avez envie de rire. Vous êtes aux anges, vous êtes au Paradis et c’est tout simplement inexprimable.
Les gens aperçoivent des anges s’approcher d’eux. Ils ne sont pas inquiets pour autant, car l’aspect des anges est bienveillant bien qu’il soit auguste et sérieux. Ils entendent leur appel clairement :
« Que les gens qui étaient bienfaisants se lèvent ! »
Des personnes se détachent des rangs et avancent vers les anges :
« – Quel a été votre bienfaisance ? leur demande-t-on. – Nous restions cléments lorsqu’on nous offensait et nous pardonnions lorsqu’on nous portait préjudice. – Certes, confirmaient les anges. Puis ils les conduisaient au Paradis en répétant le verset : « Quelle belle récompense que celle de ceux qui font le bien » »
Les anges appellent de nouveau : « Que les endurants se lèvent. »
Vous vous êtes levé ou pas encore ? En attendant, vous reconnaissez des personnes parmi les endurants. Vous vous rappelez ces deux époux qui ont perdu leur unique enfant ; à l’époque tout le monde les enviait pour leur patience et leur calme. Ils étaient tristes mais ne contestaient pas. Maintenant vous voyez sur leurs visages une joie ineffable. Ils s’échangent des regards entendus comme s’ils se félicitaient de s’être mutuellement encouragés pendant la durée de leur épreuve.
Vous voyez ce couple, un homme qui marche la tête haute, l’air comblé. Vous l’aviez connu lorsqu’il avait encore quinze ou seize ans. Il était venu habiter votre quartier avec sa mère malade.
Orphelin, pauvre, seul ; raisons suffisamment valables pour s’attirer les animosités des froides consciences et des esprits cruels ! Au début les jeunes gens du quartier; des faignants et des malfaiteurs qui étaient des criminels à l’occasion, ont essayé de le corrompre mais il avait repoussé leurs avances ; alors ils lui ont déclaré une guerre sans merci. Impertinences, railleries, sarcasmes, affronts. Il subissait tout cela comme on reçoit la pluie qui tombe du ciel ; on se force de l’éviter sans jamais penser à l’attaquer. Et comme le vent finit par dissiper les nuages ; son indulgence a fini par triompher; toute cette bande de malfrats n’a pris que peu de temps pour se dissoudre. Quelques-uns ont complètement changé et sont devenus les amis de l’orphelin, les autres ont tout simplement disparu du quartier sans que personne ne sache ni quand ni comment !
Vous êtes plein de respect pour cet homme. Tous ses voisins attestaient de sa bienveillance envers sa mère malade ; s’étonnaient de son assiduité à la prière à la mosquée, se félicitaient d’avoir un voisin aussi aimable et serviable.
Quelle fière allure il a à présent ! Il tient la main de sa mère qui le regarde avec une joie ineffable. Elle avait enduré courageusement la mort de son mari, avait travaillé dur pour élever son enfant sans jamais penser à se remarier. Elle avait enfin patiemment supporté sa longue maladie avant de mourir en paix et en complète sérénité.
Certes, durant toute sa vie il avait su pertinemment quelle était la récompense de l’endurance.
« …et les endurants auront leur pleine récompense sans compter. »
Vous aviez eu parfaitement raison de suivre le conseil du Prophète (saw) :
« Récitez le Coran, parce qu’il intercède le Jour de la résurrection à ceux qui le récitent ; récitez les deux Illuminantes (la Vache et la Famille de ‘Imran), parce qu’elles arrivent le Jour de la résurrection comme deux nuages ou comme deux nuées d’oiseaux en ordre, pour argumenter en faveur de ceux qui les ont récitées. »
Les deux sourates sont en train d’argumenter très fortement en votre faveur ; il s’avère effectivement que vous en avez extrêmement besoin, vous aviez mêlé de bonnes actions à d’autres mauvaises. Heureusement pour vous que leurs arguments sont acceptés.
« Et ils n’intercèdent qu’en faveur de ceux qu’Il a agréés [tout en étant] pénétrés de Sa crainte. »
Vous pouvez maintenant rejoindre le Prophète (saw). Depuis un moment déjà vous le voyez debout sur une estrade, au milieu d’un immense bassin et donnant à boire aux gens. Au fur et à mesure que vous vous approchez, vous êtes ébloui par la blancheur de l’eau du bassin. Arrivé au bord, vous levez un regard timide et hésitant vers le Prophète (saw) :
« – Est-ce qu’il m’adressera la parole ? Car il faut bien l’avouer, vous aviez longtemps ignoré jusqu’aux plus simples de ses instructions. La religion a été pour vous des gestes monotones et ennuyeux auxquels vous restiez fidèles par la force de l’habitude plutôt que par dévouement. »
Il est arrivé un événement heureux qui a changé cet état de choses. Vous avez répondu à l’invitation d’un ami pour aller à Médine rendre visite au Prophète (saw). Cette visite vous a profondément ébranlé. Vous étiez assis près de la tombe sacrée du Prophète alors que votre ami vous parlait de l’amour et de la miséricorde du Prophète pour sa communauté. Depuis, vous avez complètement changé. En ce moment vous rencontrez le regard reconnaissant du Prophète. Il a l’air très content de vous. Peut-être est-ce grâce aux efforts que vous avez faits pour rappeler aux gens les instructions de leur prophète ? Grâce à vous plusieurs personnes se sont repentis de leur insouciance et sont revenues vers le droit chemin.
C’est un spectacle impressionnant que toute cette foule qui se dirige, guidée par les anges, vers le Paradis. Quoique cette masse de gens semble compacte et impénétrable ; on aperçoit çà et là des espaces libres et presque vides. Là on peut voir marcher côté à côte des assemblements moins importants ; tantôt ce sont des couples ; tantôt ce sont des groupes de trois ou quatre personnes. Ils se parlent très bas, rient, s’étonnent, courent puis s’arrêtent pour parler à quelqu’un, lèvent curieusement leur tête pour scruter l’horizon. Ils ont l’air radieux, beaux, heureux, intrigués.
Peut-être êtes-vous parmi ces bienheureux ; vous devez être très excité maintenant. En effet, vous voyez une clarté naissante qui arrive de loin illuminer tout ce qu’elle touche. Tout ce qui se passe à partir de ce moment est indéfinissable. Vous êtes si ébloui que vous n’arrivez pas à comprendre ce qu’on vous dit. Vous vous méprenez mais les anges vous rassurent. Enfin, vous y êtes.
Vous entendez quelqu’un à côté de vous pleurer à chaudes larmes. Vous le reconnaissez tout de suite. Vous l’avez vu se faire tuer lui et son fils en Palestine dans un spectacle poignant et révoltant en direct sur des chaînes de télévision. Il était certes extrêmement menaçant, alors qu’il était sans arme, tremblant, terrorisé, il repoussait son fils derrière lui pour le défendre contre la pluie des balles qui les mitraillaient de tous les côtés. Ses assassins se sont félicités plus tard de s’être débarrassés d’ennemis aussi dangereux !
Tout à coup il vous tire par la manche et vous montre quelque chose. Vous tournez la tête vers l’endroit indiqué et là vous voyez un gouffre noir et fumant. Bien que l’intérieur de ce gouffre soit tout à fait noir, vous arrivez à y distinguer des faces rouges, brûlées, ahuries, horribles. Vous entendez alors votre camarade interpeller ces têtes atroces : « … « Certes, nous avons trouvé vrai ce que notre Seigneur nous avait promis. Avez-vous aussi trouvé vrai ce que votre Seigneur avait promis? » « Oui », diront-ils. »
Puis vous entendez un héraut annoncer :
« Que la malédiction d’Allah soit sur les injustes »
Après s’être installé dans vos demeures, survient un instant crucial. Une scène impressionnante attire les habitants des deux mondes opposés.
« On amène un bélier blanc et on l’arrête entre le Paradis et l’Enfer. Un héraut crie: « Hé! Les gens du Paradis. Reconnaissez-vous ceci? ». Ceux-ci tendent le cou et regardent. – « Oui, répondent-ils, c’est la mort ». Ensuite le héraut crie: « Hé! les gens de l’Enfer. Reconnaissez-vous ceci? ». Ceux-ci tendent le cou et regardent. – « Oui, répondent-ils, c’est la mort ». »
Puis, l’ordre est donné d’égorger le bélier.
« Ô gens du Paradis, s’écrie ensuite le héraut, vous êtes immortels; la mort n’existe plus. Ô gens de l’Enfer, vous êtes immortels; la mort n’existe plus ».
Allah (exalté soit-Il) dit:
« Et quand tout sera accompli, le Diable dira: « Certes, Allah vous avait fait une promesse de vérité; tandis que moi, je vous ai fait une promesse que je n’ai pas tenue. Je n’avais aucune autorité sur vous si ce n’est que je vous ai appelés, et que vous m’avez répondu. Ne me faites donc pas de reproches; mais faites-en à vous-mêmes. Je ne vous suis d’aucun secours et vous ne m’êtes d’aucun secours. Je vous renie de m’avoir jadis associé [à Allah] ». Certes, un châtiment douloureux attend les injustes [les associateurs] »
En entendant cette ultime sentence, des voix enrouées et rauques jaillirent subitement du Feu. Ces êtres maudits à jamais interpellent les gardiens :
« Priez votre Seigneur de nous alléger un jour de [notre] supplice. »
Les gardiens les interrogent :
« Ils diront: « vos Messagers, ne vous apportaient-ils pas les preuves évidentes? » Ils diront: « Si »! Ils [les gardiens] diront: « Eh bien, priez » ! Et l’invocation des mécréants n’est qu’aberration. »
Voyant leurs conjurations inutiles, ces malheureux s’écrient :
« Ô Malik! Que ton Seigneur nous achève! » Il dira: « En vérité, vous êtes pour y demeurer [éternellement] »! »
Puis ils implorent Allah l’Exalté dans une tentative extrême:
« Ils dirent: « Seigneur! Notre malheur nous a vaincus, et nous étions des gens égarés. » Ils ajoutent gémissants: « Seigneur, fais-nous-en sortir! Et si nous récidivons, nous serons alors des injustes ». »
Cependant point de souci pour les bien-aimés d’Allah ; on les appelle et on les rassure : Vous êtes ici à l’abri de toute crainte et aucune affliction ne vous effleurera. Car de votre vivant, vous étiez parmi :
« Ceux qui croient et qui craignent [Allah]. »
Les gens du Paradis s’échangent des regards satisfaits et contents. L’un d’eux a l’air encore plus touché par cet appel. Son visage était inondé de larmes, il se souvient du jour de son premier repentir. Il venait d’avoir quarante ans et travaillait dans une importante firme. A cette époque de sa vie, il ne pensait qu’à la manière de gagner plus d’argent.
Il n’avait pas eu la patience d’attendre ou de gagner l’argent par les méthodes licites ; il avait détourné l’argent de la société et a vécu depuis dans l’illicite. Allah l’Exalté a voulu le sauver de son égarement et Il l’a réveillé brutalement. Un accident lui a ouvert les yeux. Il est retourné à la religion et a fini par reconnaître ses péchés.
Pourtant il était très hésitant au début car il lui semblait que rien ne pouvait racheter ses fautes passées mais il a changé d’avis en lisant les paroles pleines de miséricorde et de pitié :
« Dis: « Ô Mes serviteurs qui avez commis des excès à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde d’Allah. Car Allah pardonne tous les péchés. Oui, c’est Lui le Pardonneur, le Très Miséricordieux. » »
A présent, tremblant de bonheur et de gratitude, il se félicite d’avoir suivi les paroles du Prophète (saw) : « Allah l’Exalté tend Sa main pendant la journée afin que le fautif du jour se repente et tend Sa main pendant la nuit pour que le fautif de la nuit se repente. »
Il avait appris beaucoup de choses sur les bienfaits du repentir depuis, car il n’a jamais cessé de désapprouver ses mauvaises actions aussitôt qu’il s’en rendait compte. Comment en serait-il autrement alors que le Prophète (saw) disait qu’il implorait le pardon d’Allah cent fois par jour alors qu’Allah l’exalté lui a dit :
« Afin qu’Allah te pardonne tes péchés, passés et futurs, qu’Il parachève sur toi Son bienfait et te guide sur une voie droite; »
A partir de ce moment surviennent des appels destinés exclusivement aux habitants du Paradis.
Allah l’Exalté s’adresse aux habitants du Paradis : « Ô habitants du Paradis! Vous avez encore droit à quatre choses de Ma part ; Que vous viviez et que vous ne mourriez jamais ; Que vous soyez bien-portants et que vous ne tombiez jamais malade ; Que vous soyez jeunes et que vous ne vieillissiez jamais ; Que vous soyez heureux et que vous ne soyez jamais malheureux. »
Ou encore ce sont les anges qui appellent : « Ô habitants du Paradis ! Vous avez une promesse de la part d’Allah l’Exalté. Venez donc pour rendre visite au Miséricordieux. »
Les gens ne se le font pas dire deux fois ; d’ailleurs vous êtes vite bousculé par la foule derrière vous. Arrivés au lieu du rendez-vous, chacun prend sa place comme s’il la connaissait depuis toujours. Avant de vous installer vous lancez un rapide coup d’œil autour de vous. Les chaires ne sont pas toutes de la même nature, il y en a qui sont en lumière ; d’autres sont en or, d’autres encore en pierres étincelantes dont vous ne savez même pas le nom ; vous portez ensuite votre regard un peu étonné sur votre propre siège qui était en argent. Si le regret était possible au Paradis vous seriez maintenant plein de remords mais il n’en est plus question, d’ailleurs vous êtes subitement subjugué par une clarté éblouissante.
Allah l’Exalté interpelle Ses visiteurs : « Habitants du Paradis ; Que la paix soit sur vous. Vous répondez tous: « Seigneur Tu es la paix et de Toi est la paix, Bénit sois-Tu. Tu es plein de Majesté et de Magnificence. » « Où sont Mes serviteurs qui M’ont obéit sans qu’ils Me voient ? Aujourd’hui est le jour du complément, demandez donc ce que vous désirez. Tous se mettent d’accord sur la même requête : Sois satisfait de nous ô Seigneur. Il leur répond : « Si Je n’étais pas Satisfait de vous, Je ne vous aurais pas fait entrer dans Mon Paradis, mais demandez autre chose. Cette fois, ils répondent en chœur : » Montre nous Ton visage Ô Seigneur. » Les voiles se lèvent et tous regardent leur Seigneur. Aucune jouissance qu’ils ont connue jusque-là n’est égale ou même comparable à ce moment ineffable et indescriptible ! »
Mais ce n’est pas tout ; le Prophète (saw) dit : « Chacun d’entre vous aura une entrevue privée avec Allah l’Exalté. » Il lui dira : « Mon serviteur demande-Moi ce que tu veux ; le croyant commencera à dénombrer ses désirs mais s’arrêtera vite parce qu’il épuise toutes les envies dictées par son imagination et ne trouve plus rien à ajouter. Le Seigneur lui dira : Ne désires-tu pas ceci ? N’as-tu pas oublié de demander cela ? »
Est-ce que vous pouvez imaginer ce que sont vos sentiments en ce moment ?
Les mots ne sont plus capables de rendre les véritables et insoupçonnables enchantements de ce moment céleste.
Nous sommes donc dans le regret d’arrêter ici le cours de notre imagination dans les réalités proches ou lointaines mais certaines de l’au-delà. Le livre est disponible, nous vous conseillons de le lire et de le revoir très souvent. Vous aurez besoin de rappel de temps en temps. Allah (exalté soit-Il) dit :
« Et rappelle; car le rappel profite aux croyants. »
Promettez-nous néanmoins que cette nuit de ce 6eme jour de ramadan sera une occasion de repentir pour vous ; ne laissez pas la vie vous distraire de nouveau et vous faire oublier la raison de votre existence sur cette terre.
Implorez le pardon d’Allah en tout temps ; ne laissez pas la mort vous surprendre.
Allah (exalté soit-Il) dit :
« Mais l’absolution n’est point destinée à ceux qui font de mauvaises actions jusqu’au moment où la mort se présente à l’un d’eux, et qui s’écrie: « Certes, je me repens maintenant » – non plus pour ceux qui meurent mécréants. Et c’est pour eux que Nous avons préparé un châtiment douloureux. »
Nous espérons que ce court aperçu de l’au-delà vous aura été fortement bénéfique et vous aura incité à revoir et à réorganiser vos priorités. Allah dit:
« Quiconque, mâle ou femelle, fait une bonne œuvre tout en étant croyant, Nous lui ferons vivre une bonne vie. Et Nous les récompenserons, certes, en fonction des meilleures de leurs actions. »