Jour 15 : La désertion de Ka’b ibn Malik
Vivons aujourd’hui avec une nouvelle histoire dont les événements pivotent autour d’une question déterminée : Etes-vous une personne individualiste ou bien vous ressentez que vous faites partie intégrante de votre communauté? Pensez-vous d’une manière individualiste ou collective?
Rien n’empêche que vous ayez vos propres désirs, ambitions et projets, c’est votre droit, mais n’oubliez pas aussi les projets, les défis et les besoins de la communauté. Votre souci de faire réussir votre projet personnel ne doit aucunement vous faire oublier que vous êtes une partie d’un tout, qu’est la société, la communauté. A celui qui vit uniquement pour lui-même, je dis: Attention, il se peut que l’histoire d’aujourd’hui vous arrive! Chaque dirigeant dans nos communautés doit aider celui qui vit pour lui-même à s’incorporer au projet général. Si ce projet général fait lacune, l’individualisme et le repli sur soi deviendront de plus en plus intenses. Le cas échéant, le dirigeant serait certes responsable aussi bien que les individus. Contemplons ensemble un modèle éminent du dirigeant exemplaire: le Prophète (saw).
Une question importante Si chaque individu consacre sa vie à son projet personnel et oublie celui de sa communauté, quelles en seront les répercussions… Comme par exemple celui qui vend aux gens la viande d’ânes et la leur sert à manger; celui qui exporte des aliments périmés, et même lorsque les douanes les confisquent et les jettent dans les poubelles, il les en ramasse, les emballe à nouveau et les vend aux gens; Celui qui exporte de la Chine des robinets de gaz non conformes aux normes de sécurité, et, en achetant les fonctionnaires chargés de les détruire, il parvient à s’en procurer pour les vendre aux gens, lesquels, à leur tour, les utilisent dans leurs maisons et finissent par perdre, à cause de la fuite de gaz, leurs enfants! Pourquoi? Parce que cette personne vit uniquement pour elle-même et pour son propre projet et oublie les autres.
L’histoire d’aujourd’hui ressemble au rhumatoïde. Avez-vous idée de cette maladie? Le rhumatoïde est une inflammation qui affecte les os et finit par les détruire, les rendant ainsi incapables de supporter le corps, lequel se trouve alors complètement paralysé. Savez-vous comment cette maladie atteint-elle le corps? Les cellules sont à l’origine complémentaires, les unes complètent les autres. Cette maladie surgit lorsque chaque cellule cherche à s’emparer de l’autre et regarde celle-ci non plus avec complémentarité mais avec concurrence. Là, la maladie de la destruction des os atteint le corps. A mon avis, le corps de notre communauté souffre du rhumatoïde.
Savez-vous comment se forme le cancer? A l’origine, la nourriture et l’oxygène se dirigent vers la cellule et restent avec elle trois secondes, puis celle-ci les transporte à la cellule suivante et ainsi de suite. Cette maladie atteint le corps lorsqu’une cellule garde la nourriture et l’oxygène plus que trois secondes sans les faire passer à sa voisine, ou lorsqu’elle en emmagasine une quantité plus grande que la quantité prévue. Là, le cancer attaque le corps, qu’Allah nous en protège.
Allah, Exalté soit-Il, nous fait-il apprendre, par le biais des maladies du corps humain, comment immuniser le corps de notre communauté contre ces maladies?
La raison de cette histoire et ses événements: L’article d’aujourd’hui est un nouveau miroir que nous offrent les récits du Coran pour nous apprendre à faire face à cette maladie. C’est l’histoire d’un homme appelé Ka`b ibn Malik, un des Compagnons du Prophète (saw). Elle se déroula en la neuvième année de l’Hégire, c’est-à-dire un an avant le décès du Prophète (saw). Elle eut lieu à cause de la bataille de Tabūk, une des batailles que le Prophète (saw) mena afin de relever le défi des Byzantins qui mobilisèrent des troupes pour attaquer les musulmans à Médine. Ces derniers devaient alors sortir avec une grande armée à même d’affronter ces troupes avant que celles-ci n’envahissent Médine.
Le temps était extrêmement critique car d’une part il faisait très chaud et d’autre part les fruits étaient déjà mûrs et devraient être cueillis. Chacun des Compagnons – qui étaient majoritairement cultivateurs – avait donc son propre projet, à savoir celui de se préparer pour récolter la moisson, la source de sa subsistance. Or, il y avait un autre défi que la communauté affrontait. Ils devaient faire un long trajet de 10.000 km de Médine jusqu’à Tabūk. De plus, ils manquaient de ressources.
En effet, Allah, Exalté soit-Il, nomma cette bataille dans le Coran de « Al `Osra », c’est-à-dire « le moment difficile », et ce vu les peines et les difficultés intenses qui la marquaient. Chaque trois Compagnons se partageaient un seul chameau qu’ils chevauchaient à tour de rôle, figurez-vous combien de kilomètre devait chacun d’eux faire à pied !!
L’histoire est rapportée dans Sahih Al Boukhâri, et fut révélée dans la Sourate 9 At-Tawba (le Repentir) pour parler de Ka`b ibn Malik. « Le repentir », titre de cette Sourate, ne se limite pas cette fois au repentir des péchés commis, mais il s’étend pour embrasser le repentir de l’individualisme. Si vous faites partie de ceux qui ne vivent que pour eux-mêmes, vous devez vous repentir. Si vous êtes une mère qui ne se soucie que de ses propres enfants et oublie ceux des familles démunies qui vivent dans votre communauté, vous aussi vous devez vous repentir.
D’après Ka`b ibn Malik:
« Je n’ai jamais faussé compagnie au Messager d’Allah dans aucune de ses batailles sauf celle de Tabūk »
On dirait qu’il voulait dire: « Je ne suis pas individualiste ». Il ne manqua pas à suivre le Messager d’Allah (saw) qu’une seule fois et il subit un châtiment très dur. Combien de fois avez-vous faussé compagnie au Messager d’Allah (saw) par votre comportement qui n’honore pas son enseignement?
Il dit aussi: « Je fus effectivement témoin du serment d’allégeance de ‘Aqaba ». En fait, le serment d’allégeance d’Al `Aqaba est un incident qui revêt une grande importance et une immense célébrité. On dirait que Ka`b voulait ainsi mettre en relief sa loyauté et sa franchise.
Il poursuivit en disant: « Le Messager d’Allah n’entreprenait jamais une expédition sans faire semblant de se diriger vers une autre (pour tromper les espions de l’ennemi) sauf pour la bataille de Tabūk ».
C’est que l’ennemi cette fois, les Byzantins, étaient fort nombreux et la distance à parcourir était grande. L’affaire n’étant pas facile, les Compagnons devaient alors prendre leurs dispositions en conséquence.
Ka`b ibn Malik parla du conflit interne entre son ego et son pays, entre son intérêt personnel d’une part et l’intérêt de sa patrie et les besoins des gens, des pauvres et des orphelins d’autre part. Il dit:
« Quant à moi, je sortais tous les matins pour m’équiper mais je rentrais sans en avoir rien fait, me disant, à chaque fois, que je pourrais le faire à l’heure que je voulais ».
Cette situation dura jusqu’à ce que les musulmans prirent le chemin de la guerre avec le Messager d’Allah (saw). Ka`b ibn Malik ne cessait pas de se dire:
« Je pourrais le faire à l’heure que je voulais, et je sortirais au marché pour m’équiper ».
Vous arrive-t-il de remettre vos initiatives à chaque fois que vous commencez à vous préparer pour entreprendre une action utile?
Au sujet de sa défection de cette bataille, Ka`b poursuit:
« Je n’ai jamais été plus fort, ni plus riche que lorsque j’y fis défaut. Par Allah, je n’ai jamais possédé avant elle deux montures à la fois ».
Il se confronte en toute transparence, il avoue qu’il est fautif et nie toute justification qui pourrait éventuellement lui servir d’excuse.
Il dit:
« Je rentrai donc chez moi, cette fois encore, sans avoir rien fait; si bien qu’ils prirent sur moi une trop grande avance. A un moment donné, pourtant, j’ai voulu partir sur leurs traces (et combien j’aurais voulu l’avoir fait!) mais Allah ne me prédestinait pas à cet honneur. Chaque fois que je me mêlais aux gens après le départ du Messager d’Allah, je ne me voyais semblable qu’à quelqu’un sur qui pesait lourdement une ombre d’hypocrisie ou à l’un de ces faibles qu’Allah avait exemptés pour cause de maladie .»
Ka`b commença à réaliser l’énormité de l’erreur qu’il avait commise lorsqu’il ne suivit pas le Messager d’Allah (saw). Quarante jours s’écoulèrent depuis le départ du Messager d’Allah (saw).
Ka`b dit:
« Lorsque j’appris que le Messager d’Allah avait pris le chemin du retour de Tabūk, je fus envahi d’une grande tristesse. Je me mis à penser à quelque mensonge pour me disculper en me disant en moi-même : « Quelle excuse va bien me sortir de sa colère? » Le lendemain matin il était de retour.»
Il est à souligner que Ka`b était un poète éloquent. Figurez-vous donc le degré de franchise avec soi qu’il atteignit. Il voulut, en enregistrant ce conflit intérieur et ces sentiments intimes, nous faire apprendre cette leçon, pour qu’aucun de nous n’ait plus d’excuse s’il répète la même erreur.
Ka`b poursuivit:
« Quand on m’a appris que le Messager d’Allah était désormais tout proche, toutes mauvaises inspirations disparurent de mon esprit et je sus ainsi que rien ne pouvait me sauver de sa colère. Aussi ai-je décidé de choisir plutôt la voie de la sincérité (…) C’est alors que vinrent à lui ceux qui ne l’avaient pas suivi, lui présentant leurs excuses avec leurs serments. Ils étaient un peu plus de quatre-vingts. Il accepta leur état apparent, agréa leur allégeance et implora pour eux l’absolution divine tout en laissant à Allah, le Très-Haut, le soin de juger ce qu’ils cachaient en eux-mêmes. C’est alors que je vins moi-même. Quand je le saluai, il sourit de la façon de quelqu’un en colère puis me dit : « Viens ici! ». Je m’avançai et je m’assis devant lui. Il dit: « Qu’est-ce donc qui t’a empêché de te joindre à nous? » »
Je vous pose la même question: Qu’est-ce qui vous empêcha d’avoir une mission dans la vie? Pourquoi vous vous êtes isolés de la communauté et vous avez vécu pour vous-même? Pourquoi avez-vous préféré votre projet personnel à celui de la communauté?
Ka`b ajouta:
« Le Messager d’Allah (saw) me dit: « Qu’est-ce donc qui t’a empêché de te joindre à nous? N’avais-tu pas déjà acheté ta monture? ». Je dis : « Ô, Messager d’Allah! Si je me trouvais maintenant devant un autre que toi de tous les habitants de ce monde, j’aurais certainement jugé que je m’en sortirais par quelque excuse, d’autant plus que j’ai le don de la polémique. Mais, par Allah, j’ai bien su que si je te racontais aujourd’hui quelque mensonge pour te satisfaire, Allah ne serait pas loin de me frapper de Sa Colère et, si je te disais la pure vérité qui pourrait te fâcher quelque peu contre moi, je pourrais espérer une conclusion heureuse de la part d’Allah, Le Tout-Puissant. Par Allah, je n’avais aucune excuse de rester à l’arrière. Par Allah, je n’avais jamais été aussi fort ni aussi riche que lorsque je t’ai fait défection ». Le Messager d’Allah dit alors : « Quant à celui-là, il a parlé sincèrement. Lève-toi et va-t-en de là en attendant qu’Allah prononce sur toi Son jugement!’ »
Essayez de vous imaginer vous-mêmes lorsque vous rencontrerez le Prophète (saw) auprès de son bassin alors que votre œuvre lui est exposée. Etes-vous de ceux qui bâtissent la vie et y œuvrent sérieusement dans le bien? Ou bien de ceux qui s’enthousiasment pour accomplir une œuvre puis l’abandonnent? Ou bien de ceux qui firent défaut et se mirent à pleurer jour et nuit en vain?
Une pause pour méditer sur la sincérité:
Avez-vous remarqué que Ka`b s’évertua à rechercher la sincérité et ne mentit pas? Ceci est un point très important et a un sens profond. C’est que, d’une part, le mensonge va à l’encontre de la foi. D’autre part, Ka`b voulut être digne de respect car le menteur s’avilit tel les hypocrites qui sont au fond extrêmement déshonorés, ils le ressentent bien malgré la fierté qu’ils manifestent. Ne vous avilissez pas donc!
L’homme aime par nature être respectable. Ne mentez donc pas pour éviter d’être déshonoré et demeurer respectable.
Commettre une erreur n’est pas un défaut en soi, nous sommes des humains et à l’intérieur de chacun de nous il y a un conflit entre le vrai et le faux, entre notre ego et l’intérêt public. S’il vous est arrivé de vivre pour vous-même, allez-y, mettez-vous face à vous-mêmes, réformez-vous tel que Ka`b ibn Malik nous enseigna.
Ka`b ibn Malik reprit:
« Par Allah, on n’a pas cessé de me faire des reproches jusqu’à ce que j’ai voulu retourner auprès du Messager d’Allah pour revenir sur mes premières déclarations. Puis je leur dis: « Est-ce que d’autres sont dans mon cas? » Ils dirent : « Oui, il y a deux hommes qui tinrent les mêmes propos que toi et qui obtinrent la même réponse ». Je dis : « Qui sont-ils? ». Ils dirent : ‘Mourara Ibn Arrabi` Al ‘Amrî et Hilâl Ibn Oumaya Al Wâqifî’. Ils m’ont nommé là, ajouta Ka`b, deux hommes vertueux qui avaient participé à la bataille de Badr et qui étaient dignes d’être pris en exemple. Lorsqu’on me les cita, je m’en allai. Le Messager d’Allah avait interdit entre temps qu’on nous adressât la parole à tous les trois entre tous ceux qui avaient déserté. Ainsi les gens nous évitaient (ou il a dit: « changèrent d’attitude envers nous ») si bien que je ne reconnaissais plus la terre car ce n’était plus celle que je connaissais. Nous restâmes dans cette situation cinquante longues nuits ».
Les gens les évitèrent cinquante nuits! Aucun parent, aucun ami, aucun habitant de Médine ne leur parlait, même pas un salut !! Quelle punition difficile! Cependant, ils demeurèrent fiers de leur sincérité, contrairement aux hypocrites déshonorés par leur mensonge.
Ka`b ibn Malik fit défaut au Messager d’Allah (saw) une seule fois et sa punition dura cinquante jours. Interrogez-vous donc: combien de fois avez-vous fait défaut au Messager d’Allah (saw) en ne respectant pas ses recommandations? Faites-vous défaut à la communauté? Vivez-vous pour vous-même?
Les jours pénibles:
Lorsque le Messager d’Allah (saw), interdit aux habitants de Médine tout contact avec Ka`b et ses compagnons, celui-ci décrit l’état d’accablement où il était en employant une expression très touchante. Il dit:
« Je ne reconnaissais plus la terre car ce n’était plus celle que je connaissais ».
Allah, Le Très Haut, le décrit de même dans le Saint Coran; il dit:
« Et [Il accueillit le repentir] des trois qui étaient restés à l’arrière si bien que, toute vaste qu’elle fût, la terre leur paraissait exiguë; ils se sentaient à l’étroit, dans leur propre personne et ils pensaient qu’il n’y avait d’autre refuge d’Allah qu’auprès de Lui. »
(Coran 9 Verset 118)
Mais n’était-ce pas une punition trop dure? Pourquoi le Prophète (saw) ne lui pardonna-t-il pas? C’est pour vous apprendre que le droit de la patrie, de la communauté n’est pas négligeable. L’affaire ne concernait pas seulement le Prophète (saw) mais la communauté entière. Étant donné que le Prophète (saw) est l’éducateur de cette communauté, il nous envoie ce message pour nous apprendre qu’il nous est impératif de le suivre et de ne jamais lui faire défaut. Pouvez-vous vous absenter lors de l’intercession du Prophète (saw) ou lors du rassemblement autour de son bassin le Jour de Résurrection?
Ka`b poursuit en disant:
« Quant à mes deux compagnons d’infortune, ils se résignèrent à leur sort, restèrent dans leur maison et ne cessèrent pas de pleurer. Pour ma part, j’étais le plus jeune et le plus fort des trois. Je sortais pour prendre part à la prière avec les musulmans et je parcourais les marchés sans que personne ne m’adressât la parole. J’allais à chaque fois au Messager d’Allah, je le saluais alors qu’il était assis après la prière. Je me demandais en moi-même s’il avait ou non remué les lèvres pour répondre à mon salut. Puis je me plaçais pour prier tout près de lui et je l’épiais furtivement. Quand je me plongeais dans ma prière, il me regardait et quand je me tournais vers lui, il se détournait de moi ».
Imaginez combien était difficile cette situation…!
Ka`b reprit:
« Quand cette mise en quarantaine des musulmans dura trop longtemps pour moi, je n’ai pas hésité à passer par-dessus le mur de Abou Qatada; il était mon cousin et l’un de mes plus chers amis. Je lui adressai le salut. Par Allah, il n’a même pas daigné me le rendre. Je lui dis : « Ô, Abou Qatada! Je te supplie par Allah de me dire si tu sais que j’aime Allah et Son Messager ». Il se tut. J’y revins de nouveau et il se tut encore. J’insistai encore une fois et il me dit enfin: « Allah et Son Messager sont plus à même de le savoir ». Mes yeux débordèrent alors de larmes. Je m’en allai et passai de nouveau par-dessus son mur ».
Ka`b poursuivit:
« Tandis que je déambulais dans les rues commerçantes de Médine, voilà qu’un Nabatéen (paysan) de Syrie, de ceux venus avec du blé pour le vendre, criait: « Qui peut me dire où se trouve Ka’b Ibn Malek? ». Les gens se mirent à me désigner jusqu’à ce qu’il vînt à moi et me donnât une lettre de la part du roi des Ghassanides. Je savais alors lire. Je lus donc la lettre et il y avait ceci: « Or, donc, nous avons appris que ton compagnon (le Prophète) est en froid avec toi et Allah ne t’a jamais placé dans une demeure d’humiliation et d’abandon. Rejoins-nous donc et nous te consolerons de tes déboires ».
Ka`b reprit alors:
« Je dis après sa lecture: « Voilà bien encore l’une de ces épreuves qui m’accablent en ces moments ». Je me dirigeai avec la lettre vers le four à pain et je la brûlai. »
Ka`b ibn Malik est un homme qui tient à ses origines, un véritable croyant qui, malgré le conflit psychologique dont il souffre, ne sacrifia ni sa patrie ni les siens.
Ka`b poursuivit son histoire en disant:
« Jusqu’à ce qu’eussent passé quarante nuits (de la quarantaine imposée); la révélation d’Allah tardait à venir (pour me disculper). Le Messager du Prophète vint alors me dire: « Le Messager d’Allah t’ordonne de ne plus approcher ta femme ». Je lui dis: « Dois-je la répudier? ou bien que dois-je faire? ». Il dit: « Non, mais isole-toi simplement d’elle et ne l’approche plus ». Il envoya le même message à mes deux compagnons. Je dis à ma femme: « Va chez ta famille et restes-y jusqu’à ce qu’Allah prononce Son jugement dans cette affaire » »
Son épouse ne lui parlera plus, c’est qu’elle fait partie de la communauté, et son affiliation à sa patrie est plus forte que son affiliation à son époux. Voilà un sens très important à souligner.
A cet égard, Ka`b continua en disant:
« La femme de Hilal Ibn Oumaya vint dire au Messager d’Allah: « Ô, Messager d’Allah! Hilal Ibn Oumaya est un vieillard perdu n’ayant aucun domestique. Est-ce qu’il te répugne que je le serve ? ». Il dit: « Non, mais qu’il ne t’approche surtout pas! ». Elle dit: « Par Allah, il est incapable de quoi que ce soit et, par Allah, il ne cesse de pleurer jusqu’à ce jour depuis cette triste affaire » ».
Je vous prie de ne jamais faire fi au repentir ni au service ardent d’autrui. Mettez fin à ce sommeil, aidez votre pays, votre village, vos proches et vos amis. Commencez par une famille démunie, aidez-la, tirez-la de la misère, enseignez ses membres, élaborez un petit projet pour eux. Ne vivez pas exclusivement pour vous-mêmes.
Réjouis-toi! Allah a accueilli ton repentir…: La cinquantième nuit venait de s’achever, Allah, Le Très Haut, révéla Sa parole dans la Sourate 9 At-Tawba (Le repentir) à partir du verset 117 jusqu’au verset 121:
« Allah a accueilli le repentir du Prophète, celui des Emigrés et des Auxiliaires qui l’ont suivi à un moment difficile, après que les cœurs d’un groupe d’entre eux étaient sur le point de dévier. Puis Il accueillit leur repentir car Il est Compatissant et Miséricordieux à leur égard. Et [Il accueillit le repentir] des trois qui étaient restés à l’arrière si bien que, toute vaste qu’elle fût, la terre leur paraissait exiguë; ils se sentaient à l’étroit, dans leur propre personne et ils pensaient qu’il n’y avait d’autre refuge d’Allah qu’auprès de Lui. Puis Il agréa leur repentir pour qu’ils reviennent [à Lui], car Allah est l’accueillant au repentir, le Miséricordieux. Ô vous qui croyez! Craignez Allah et soyez avec les véridiques. Il n’appartient pas aux habitants de Médine, ni aux Bédouins qui sont autour d’eux, de traîner loin derrière le Messager d’Allah, ni de préférer leur propre vie à la sienne. Car ils n’éprouveront ni soif, ni fatigue, ni faim dans le sentier d’Allah, ils ne fouleront aucune terre en provoquant la colère des infidèles, et n’obtiendront aucun avantage sur un ennemi, sans qu’il ne leur soit écrit pour cela une bonne action. En vérité Allah ne laisse pas perdre la récompense des bienfaiteurs. Ils ne supporteront aucune dépense, minime ou importante, ne traverseront aucune vallée, sans que (cela) ne soit inscrit à leur actif, en sorte qu’Allah les récompense pour le meilleur de ce qu’ils faisaient. »
Ces versets furent révélés lors de la prière d’Al Fajr. Quant à Ka`b, tellement affligé et attristé, il faisait sa prière sur le toit de sa maison. Une fois révélés ces versets annonçant l’agrément du repentir de Ka`b et de ses deux compagnons, deux hommes se lancèrent, l’un chevaucha sa monture et l’autre escalada un mont. Voyez comme la société est cohérente, chacun se soucie de l’autre. Voyez comme l’individualisme est répréhensible?
A cet égard, Ka`b dit:
« J’entendis tout à coup la voix de quelqu’un qui criait du haut du mont me disant aussi fort qu’il pouvait: ‘Ô, Ka’b Ibn Al Malek ! Réjouis-toi de la bonne nouvelle! ». Je tombai aussitôt en prosternation sachant que quelque chose de nouveau était venue me délivrer de ma situation oppressante »
Ka`b poursuivit:
« Quand vint à moi celui dont j’avais entendu la voix annonciatrice de bonne nouvelle, j’ôtai mes deux tuniques et je l’en revêtis, en récompense de sa bonne nouvelle. Par Allah, je n’avais pas d’autres tuniques que celles-là. Je dus en emprunter deux pour me couvrir moi-même. Je partis alors en direction du Messager d’Allah alors que les gens m’accueillaient en groupe, me félicitant de l’agrément de mon repentir et me disant: « Nous te félicitons pour l’agrément par Allah de ton repentir » .
La révélation des versets changea la position des musulmans qui félicitèrent si chaleureusement leur frère alors qu’ils évitaient la veille tout contact avec lui. Comme il est influent, le Coran!
Ka`b poursuivit:
« J’entrai finalement à la mosquée et voilà que le Messager d’Allah y étais assis au milieu des gens. Il me serra la main et me félicita (…) Lorsque j’eus salué le Messager d’Allah, il me dit, le visage rayonnant de joie: « Réjouis-toi du plus beau jour que tu n’aies jamais connu depuis que ta mère t’a mis au monde! ». (…) D’ailleurs, lorsque le Messager d’Allah était content, son visage rayonnait de lumière au point qu’il ressemblait à un morceau de lune éclatante. »
Imaginez maintenant que le Prophète (saw) vous rencontre le Jour de la Résurrection, préférez-vous qu’il vous accueille avec un sourire ou bien avec un regard déçu car vous lui avez fait défaut? Savez-vous quel est le plus beau jour de votre vie? C’est le jour où Allah agréa votre repentir et vous accorda son pardon.
Ka`b poursuivit son récit et dit:
« Je dis: « Ô, Messager d’Allah! Pour prouver encore plus mon repentir, je voudrais faire aumône d’une partie de mes biens pour Allah et pour Son Messager » ».
Ka`b comprit que la raison de la punition qui lui fut infligée était qu’il fit défaut à sa communauté, c’est pourquoi il voulut réparer sa faute en faisant une aumône de sa propre fortune.
Le Messager d’Allah dit:
« Garde une partie de tes biens pour toi-même, cela est préférable pour toi ». Je dis: « Je garde ma part du butin de Khaybar ». Je dis en outre: « Ô, Messager d’Allah! Allah, le Très Haut, ne m’a sauvé qu’à cause de ma sincérité et, comme autre preuve de mon repentir, je ne dirai plus que la vérité tant que je vivrai ».
C’est que fut révélé le verset où Allah, Exalté soit-Il, dit:
« Ô vous qui croyez! Craignez Allah et soyez avec les véridiques »
(Coran 9 Verset 119)
Qu’en est-il avec les hypocrites? Allah, Le Très Haut, révéla Sa parole à leur égard dans ce verset:
« Ils vous feront des serments par Allah, quand vous êtes de retour vers eux, afin que vous passiez (sur leur tort). Détournez-vous d’eux. Ils sont une souillure et leur refuge est l’Enfer, en rétribution de ce qu’ils acquéraient »
(Coran 9 Verset 95)
Qui parmi vous est prêt à s’engager, dès maintenant, à ne jamais faire défaut au Messager d’Allah (saw)? Qui se repent auprès d’Allah, Exalté soit-Il, de son individualisme? Soyez sincère tel que nous l’enseigna Ka`b ibn Malik, tournez donc la page et commencez une nouvelle phase dans votre vie.