Les Récits de la Tradition

Le Meilleur des Garants

Il y a bien longtemps, un homme parmi les Enfants d’Israël se trouvait dans une situation difficile. Il avait besoin d’argent car il se préparait pour un long voyage dans lequel il espérait pouvoir faire quelque profit. N’ayant pas le temps suffisant pour le gagner, il décida de demander à l’un de ses amis ladite somme. Il se rendit chez lui et, après quelques échanges de politesse, il lui dit :
– Je m’apprête à partir en voyage et j’ai besoin d’argent. Tu m’apporterais une grande aide si tu consentais à me prêter mille dinars.

Son ami était riche, donc lui prêter l’argent était chose facile. Il y consentit donc volontiers. Néanmoins, par souci de clarté, il lui répondit :
– Il n’y a aucun problème. Je te prêterai tout l’argent dont tu as besoin. Mais faisons les choses correctement, et amène-moi un ou deux témoins pour attester de notre accord.

Notre homme était quelqu’un de profondément honnête et scrupuleux. C’était surtout un homme doté d’une foi profonde et d’une crainte immense vis-à-vis de Dieu. II lui répondit :
– Dieu me suffira comme Témoin.

Son ami le regarda quelque peu surpris, mais il se dit : pourquoi pas ? C’est vrai qu’il n’y a pas de meilleur témoin que le Créateur de toute chose. Il lui dit donc :
– Très bien ! Passons-nous de témoin car, tu as raison, Dieu est le Meilleur Témoin qui soit. Mais il faudrait que tu puisses nommer un garant vers lequel je pourrai me tourner au cas où il t’arriverait quelque chose ou alors si, pour une raison ou une autre, tu étais dans l’incapacité de me rembourser en temps et en heure.

Mais l’homme resta fidèle à sa philosophie en lui répondant :
– Dieu me suffit comme Garant.

Son ami eut un moment d’hésitation, puis il se dit : pourquoi Alors pas ? Dieu n’est-ll pas le Meilleur Garant qui soit. Il donna son accord scellé d’une poignée de main et tous deux discutèrent des modalités, notamment du délai de remboursement. L’ami prêta les mille dinars, ce qui permit à notre homme de préparer son voyage et d’acheter des vivres et des marchandises.

Quelques jours plus tard, notre homme prit la mer. Là Il naviguait sur plusieurs jours jusqu’à son port de destination.

Là, il put faire des affaires fructueuses qui lui permirent rapidement de rassembler la somme qu’il devait à son ami et bien plus encore.

Quand il eut amassé suffisamment d’argent, il décida de rentrer. Surtout, le temps passé le rapprochait du terme du délai et il ne lui restait que quelques jours pour rendre l’argent à son ami, juste suffisamment de temps pour le voyage retour. Alors il alla au port, pour trouver un bateau qui l’emmènerait chez lui. Il demanda à plusieurs marins, mais personne n’allait dans sa cité. Inquiet, il resta là toute la journée dans l’espoir de trouver la moindre embarcation qui pourrait lui permettre d’honorer son engagement à temps, en vain. L’homme ne savait plus quoi faire. Jamais la somme d’argent ne parviendrait à son propriétaire à temps…

Il se souvenait pourtant de la fameuse discussion et de ses promesses. Et notre héros était un homme de parole, il ne supportait pas de devoir renoncer à son engagement. Il regardait la mer qui le séparait de son pays, la bourse pleine des mille dinars à la main, totalement désemparé. Puis d’un coup, son cœur s’affermit. Il se dit :
– C’est Dieu que j’ai pris comme Témoin et comme Garant. Lui Seul peut m’aider à honorer ma parole et à faire que l’argent soit restitué. Je dois au moins essayer…

Il regarda par terre et vit dans le sable un morceau de bois. Il s’en saisit et, à l’aide d’un couteau, il commença à y sculpter un trou, de sorte à ce qu’il serve de contenant. Puis il y introduisit les mille dinars ainsi qu’une lettre destinée à son ami. Il prit bien soin de fermer le trou pour que rien ne s’échappe. Puis il se mit face à l’océan et implora son Seigneur :
– Seigneur, dit-il, tu sais que j’ai emprunté ces mille dinars à cet homme. Il m’avait alors demandé qui je prenais pour témoin et j’ai refusé de prendre un autre témoin que Toi. Puis il m’a demandé de nommer un garant, mais quel garant pouvais-je prendre en dehors de Toi ? Cet homme a accepté cela. Et tu sais qu’aujourd’hui je n’ai eu cesse de chercher un navire ou même la plus petite embarcation pour pouvoir honorer ma promesse. Mais je n’en ai pas trouvé. Alors je m’en remets à Toi.

Puis il lança le morceau de bois à la mer, priant pour que Dieu l’aide à honorer sa promesse. Il resta là, sur le bord du rivage jusqu’à ce que la précieuse cargaison disparaisse à l’horizon. Puis il retourna au port, en attendant un navire pour rentrer chez lui.

De son côté, quelques jours plus tard, l’ami alla sur la plage, pour guetter l’arrivée d’un bateau. Car l’homme avait bien promis qu’il rentrerait ce jour-là pour lui rendre son argent. Il s’y rendit tôt pour être sûr de ne pas rater l’arrivée du navire, mais il attendit encore et encore. Peu avant le coucher du soleil, il avait perdu tout espoir. Déçu et quelque peu en colère d’avoir perdu autant de temps, il se dit que l’homme  s’était joué de lui, car il faut le dire, il avait manqué à sa parole. Alors, pour se calmer, et ne pas avoir l’impression d’avoir perdu sa journée, il ramassa un peu de bois pour alimenter le feu chez lui.

De retour chez lui, il entreprit de raviver le feu. Il prit un des morceaux de bois qu’il avait amassés et le cassa pour le jeter dans le bois mais quelle ne fut pas sa surprise quand il trouva une bourse pleine d’argent ainsi qu’une lettre qui lui était adressée ! Son ami avait honoré sa promesse.

Mais comment cette précieuse cargaison avait-elle pu traverser la mer et arriver jusqu’à ses pieds ?

L’ami se remémora alors qui notre homme avait pris pour Témoin et Garant. Il remercia Dieu en disant :
– Vraiment, il n’existe pas de meilleur témoin et de meilleur garant que Dieu !

Et il se félicita d’avoir accepté un tel accord.

Quelques jours plus tard, l’homme repensait toujours à cette histoire et il se disait qu’il aurait aimé pouvoir dire à son ami qu’il avait bien reçu l’argent et la lettre. Mais le quotidien reprit ses droits, et il se mit au travail, comme à son habitude. Alors qu’il était tout attelé à sa tâche, son fameux ami arriva, fonçant droit sur lui, comme s’il s’agissait d’une question de vie ou de mort. Essoufflé, avec la mine désolée, il le salua en lui mettant une bourse pleine d’argent dans la main. Il lui dit :
– Je n’ai pas de mots pour m’excuser, mais je jure par Dieu que je n’ai eu cesse de chercher un navire pour venir te rendre ton argent, et je suis resté au port des jours durant jusqu’à ce que je trouve le navire qui m’a ramené aujourd’hui.

L’ami lui fit un large sourire et lui dit :
– Ne t’inquiète pas mon ami ! Tu as pris le Meilleur Garant qui soit car Dieu a fait en sorte de me faire parvenir ce que tu m’avais envoyé dans le morceau de bois.

L’homme n’en crut pas ses oreilles. Certes, il avait mis tout son cœur et toute sa foi en Dieu dans cet acte désespéré, mais jamais il n’aurait pu penser que sa dette arrive à bon port. Les deux hommes échangèrent un regard profond et complice, persuadés qu’ils avaient pris tout deux le Meilleur des garants…

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